LES INVITÉS
AU FESTIN

Pour rompre avec tous les enfermements

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Rédigé pour le magazine du Conseil économique, social et environnemental de Franche-Comté.
Marie-Noëlle Besançon est l’auteur d’un livre « On dit qu’ils sont fous et je vis avec eux », un ouvrage préfacé par Albert Jacquard (Éditions de l’Atelier) et qui raconte l’aventure des Invités au festin.

Les Invités au Festin, une psychiatrie citoyenne pour rompre avec tous les enfermements.
Ils sont schizophrènes, psychotiques, traumatisés crâniens, dépressifs suicidaires, et ils vivent sous le même toit, avec Marie-Noëlle Besançon, psychiatre, et Jean, son mari, ancien directeur financier. Leur cadre de vie est un ancien couvent capucin, devenu la Maison des Sources, à Besançon dans le Doubs. Les treize résidents partagent les tâches domestiques et participent à des activités artistiques et culturelles. Dans la journée la Maison accueille d’autres personnes en souffrance. Ici pas de blouses blanches mais beaucoup d’attention, de partage. Une approche non conventionnelle et qui porte ses fruits. Les ré-hospitalisations sont rares, les symptômes diminuent et les traitements peuvent être allégés. Certains résidents regagnent une autonomie perdue.
Tout a commencé en 1989. Marie-Noëlle Besançon est installée depuis deux ans en tant que psychiatre dans la capitale franc-comtoise lorsqu’elle crée, avec son mari, l’association les Invités au festin qui se donne pour but d’accueillir les personnes en détresse psychologique pour rompre leur solitude.
En 1999, l’association fait l’acquisition d’un ancien couvent du XIX afin d’y développer ses activités. L’accueil de jour s’agrandit et ouvre « un lieu de vie », la Maison des sources, qui obtiendra le statut de maison relais en 2003. En 2004, Marie-Noëlle Besançon ferme son cabinet pour se consacrer entièrement à l’association. Au fil des ans, le concept a fait la preuve de son efficacité, tant sur le plan thérapeutique que sur le plan social et financier (rapporté au prix de journée d’hospitalisation, l’association fait économiser 700 000 euros par an à la collectivité). Les échos médiatiques de l’expérience éveillent l’attention de nombreuses collectivités dans toute la France. En 2006, Jean Besançon prend la direction de la Maison des sources pendant que Marie-Noëlle s’atèle à l’élaboration de la charte de IAF Réseau. Créé en avril 2007, il compte aujourd’hui 4 comités de pilotage à Lille, Lyon, Montpellier et Paris. Composé de parents de malades psychiques, de psychiatres, de travailleurs sociaux, Chaque comité travaille à la création d’une structure similaire à La Maison des Sources, labellisée Les Invités au festin. Une forme de « franchise sociale » garantissant, à travers sa charte, la prééminence des valeurs de « psychiatrie citoyenne » chères au cœur de Marie-Noëlle et Jean Besançon.

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Autre article sur La lanterne, la seconde maison-relai des IAF.

La Lanterne au cœur du village de Pouilley les Vignes
Lorsque Habitat et Humanisme Doubs allie ses compétences à celles de l’association Les Invités au Festin, le résultat est concret, intelligent et porteur d’espoir. Pour bon nombre de familles modestes, trouver un logement n’est pas une sinécure. Imagine-t-on ce que cela peut être pour une personne isolée et fragilisée par des difficultés d’ordre psychiques ? Pourtant ce public existe. Mais il est discret, pour ne pas dire invisible, et ses besoins spécifiques furent longtemps ignorés. Aujourd’hui on voit se développer des solutions, rares encore, mais très intéressantes.
La création de la maison-relais La Lanterne, qui a ouvert ses portes à Pouilley-les-Vignes (près de Besançon), est à cet égard exemplaire. La Lanterne se trouve au cœur du village, à deux pas de la mairie. C’est une vénérable et imposante bâtisse datant du début du XVIIIe siècle. Elle était vide, inoccupée depuis de longues années. Trop volumineuse (plus de vingt pièces), trop de travaux, pas vraiment adaptée aux besoins du marché. Exactement le type de bien immobilier qui intéresse Habitat et Humanisme.
Une alliance constructive
L’association Habitat et Humanisme est née à Lyon en 1985. Son fondateur était un ancien professionnel de l'immobilier devenu prêtre. Sa mission : permettre aux personnes seules et des familles en difficulté d’accéder à un logement décent et à faible loyer, mais aussi les accompagner dans une démarche de retour à l’autonomie. Aujourd’hui Habitat et Humanisme est une fédération d’associations présente dans toute la France. Habitat et Humanisme Doubs, créée en 2005, est le fruit de la rencontre de différents acteurs concernés par la question des « logements très sociaux » (Secours Catholique, ATD Quart Monde, le Diocèse, Habitat et Développement Local du Doubs, Caisse Solidaire de Franche-Comté…). Depuis sa création, l'association a connu un développement régulier qui a permis la mise en chantier de 4 projets et la création de 40 logements. Les opérations menées par Habitat et Humanisme sont souvent partenariales. Ce fut le cas pour La Lanterne de Pouilley-les-Vignes. La bâtisse fut acquise, transformée et aménagée par Habitat et Humanisme, et sa gestion en fut confiée à l’association bisontine Les Invités au Festin. Créée par la psychiatre Marie-Noëlle Besançon en 1990, les Invités au Festin inaugurait alors une approche quasi révolutionnaire de « psychiatrie citoyenne ». On dit qu’ils sont fous et je vis avec eux : toute la philosophie de l’association était résumée dans cette formule (qui est aussi le titre de l’un des ouvrages publiés par Marie-Noëlle Besançon). En 1998, l’association ouvrit une première maison-relais expérimentale, la Maison des Sources à Besançon. Douze ans plus tard, c’est grâce au partenariat avec Habitat et Humanisme que fut créée cette seconde maison, la Lanterne.
Un lieu qui soigne
La cuisine est lumineuse, ouverte sur la terrasse et le jardin. La salle à manger est vaste mais chaleureuse. Chacun des 13 résidents occupe un studio joliment aménagé. L’encadrement est assuré par deux salariés de l’association qui organisent également l’activité des nombreux bénévoles. « C’est une maison très vivante », souligne Marie-Christine Pêcheur, responsable de la Lanterne. « Chacun participe aux tâches collectives, à la préparation des repas, au ménage. Mais grâce aux bénévoles nous offrons aussi beaucoup d’activités de découverte à nos résidents, poterie, peinture, écriture, jardinage... C’est important pour reprendre confiance en soi, pour faire un autre projet et éventuellement quitter la maison. Ils ont besoin de temps, et on leur donne. La Lanterne n’est pas un lieu de soin mais c’est un lieu on prend soin des gens. » C’est aussi un lieu très ouvert. La Lanterne est associée à la plupart des activités culturelles et festives de Pouilley-les-Vignes. En 2010 les résidents participèrent au Printemps des Poètes, au Marché de Noël, à la Fête des associations… La maison elle-même devient fréquemment un lieu d’expositions, de rencontres. Lors des premières Portes ouvertes, les visiteurs étaient très nombreux. Le village semble fier de « sa maison », et la maison se sent bien dans son village.

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