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LA SOLIDARITÉ !

Une belle aventure du jardin nantais

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Texte rédigé pour l'Arrosoir, le magazine du réseau des Jardins de Cocagne.

 « Les gens ont du nous prendre pour des fous ».

 En avril 2006, Marianne Loustalot organise une petite visite pour les partenaires sociaux et institutionnels qu’elle est parvenu à convaincre de l’utilité de créer ce Jardin de Cocagne à la périphérie de l’agglomération Nantaise. « J’avais du batailler longuement pour obtenir tous les appuis, pour convaincre, et je voulais les rassurer. J’avais envie qu’ils nous voient sur notre terrain, à pied d’œuvre. Mais je ne suis pas certaine qu’ils aient été très rassurés. » Et pour cause. En ce début de printemps, le jardin qui démarre est encore une prairie, partiellement retournée, laissant voir une terre argileuse et sèche. La directrice et son jeune maraîcher se partagent un Algéco et ils ont obtenu difficilement l’installation d’un coffret électrique de chantier pour - au moins - faire marcher l’ordinateur et une lampe de bureau. Pas de remise, pas de vestiaire. Les premiers jardiniers sont conduits tous les soirs jusqu’à une maison familiale voisine pour prendre leur douche.

Neuf mois plus tard. L’ancienne prairie est désormais un beau damier de carrés de poireaux, de carottes, de choux et de terres en repos. De longues serres tunnels abritent les plantations hivernales , et une belle maison-bois écologique a remplacé l’Algéco. Et la liste d’attente des adhérents s’allonge de mois en mois. Marianne Loustalot respire un peu. L’hiver sera propice aux derniers réglages.

Tout a commencé trois ans plus tôt lorsque la famille Loustalot quitte le Jura et traverse l’hexagone pour se poser, avec enfants et bagages,  à Nantes où le compagnon de Marianne prend de nouvelles fonctions dans la filière bois. Marianne, ingénieure agronome de formation, a du quitter son emploi dans l’agro-alimentaire. Elle veut prendre une nouvelle voie. L’aventure Cocagne l’intéresse.  La jeune femme n’a pas d’expérience dans le secteur social mais son désir et son approche convainquent JG Henkel, fondateur des Jardins.

S’appuyant sur les conseils du réseau, Marianne entreprend le parcours du combattant de tout créateur de jardins qui doit prouver à tous les partenaires publics (services sociaux, financeurs, collectivités) la pertinence de son projet. Pour assurer son ancrage local, elle intègre une association nantaise, Partage 44, un important acteur du monde de l’insertion qui portera légalement le projet de ce nouveau Jardin. Un terrain de 1,5 hectare est gracieusement mis à la disposition de l’association par la commune de Carquefou, près de Nantes. À l’été 2006, le Jardin de Cocagne Nantais accueille ses six premiers jardiniers. « Nous redoutions un peu d’accueillir des personnes en quête de repères et de stabilité dans des conditions de démarrage aussi folkloriques. En fait, l’apparente fragilité de nos débuts a créé un climat de solidarité exceptionnel. Nous étions dans tous dans la même barque, tout était à construire. Ils ont créé ce jardin autant que nous. Cette galère des premiers mois est en fait un fabuleux souvenir. » Aujourd’hui, le Jardin emploie, outre sa directrice : un maraîcher encadrant à plein temps, un maraîcher à mi-temps, et une accompagnatrice sociale. Il accueille 10 jardiniers et espère, si tout se passe bien, obtenir un agrément pour 16 postes l’année prochaine. « Et autant de femmes que d’hommes. C’est une règle que nous nous sommes fixée au départ ». Reconversion réussie pour Marianne Loustalot ? « Totalement. Et ça n’est pas juste un autre métier. C’est une autre vie et une autre grille de valeurs. Même si c’est moins rémunérateur que mes emplois précédents, c’est pour moi une avancée sociale. Et j’éprouve un plaisir particulier lorsque mes enfants demandent à m’accompagner, le dimanche matin pour m’aider à l’arrosage. Il faut dire que rien que ce mot, Cocagne, depuis le départ, les fait rêver. »

Quand à la belle maison-bois bleue et blanche, qui héberge les bureaux et la salle commune, c’est un peu un cadeau de la directrice à ses jardiniers. Modèle d’exposition d’un constructeur-bois partenaire du compagnon de Marianne, elle a été cédée au Jardin pour un prix modeste sous l’amicale pression d’une directrice très convaincante.

 

 

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